En regardant nos photos du Japon, je me suis rendue compte que toutes les villes japonaises dans lesquelles nous sommes passés ont un logo magnifique.

Très stylisés, remplis de symboles inaccessibles au premier regard, ils correspondent à des caractères japonais modifiés. La plupart reprend le ou les kanji de la ville (ces caractères chinois ou sino-japonais pour ne pas les froisser), d’autres utilisent les hiragana (alphabet japonais) ou katakana (alphabet japonais utilisé pour retranscrire les noms étrangers) du nom de la ville. Ca donne des petites merveilles de graphisme.

Par contre, pour retrouver le caractère d’origine, il faut parfois se tordre le cerveau…En fait chaque trait du caractère est présent, mais peut prendre n’importe quelle forme.

Une belle façon d’accéder à l’histoire de ces villes et d’y recueillir quelques anecdotes.

 

Avec les Kanji

 

Un rigolo: celui de Fukuyama (province de Hiroshima)

Fukuyama

Le kanji 山 « yama », montagne, est déformé en…chauve-souris, oui, je ne t’apprend rien; mais pourquoi donc? Et bien parce que l’ancien nom de la ville est Kômoriyama, qui signifie « montagne aux chauve-souris », localisation du magnifique chateau de Fukuyama (le kanji 蝠 « mori » se lit aussi « fuku » d’où le deuxième nom de la ville). Ce qui est intéressant, c’est que ce symbole a été crée en 1917 (Site de la ville)…alors que le logo de notre cher Batman l’a été en 1941. Ha!

Là, une chouette vidéo:

Evolution du logo de Batman de 1941 à 2008

 

Hachinohe (province d’Aomori)

Hachinohe

Ce drapeau est constitué des kanji 八戸 (hachi et nohe) stylisés en forme de grue: le premier pour les ailes, le deuxième pour la tête. L’oiseau emblématique au Japon symbolise la paix et la ville en a bien eu besoin…Elle se remet difficilement du tsunami du 11 mars 2011.

 

Karatsu (province de Saga), tout à l’ouest du Japon:

Karatsu

Le premier kanji du nom est « sphérisé »: 唐 « kara », qui représente soit la Chine, soit le continent asiatique dans son ensemble. Le deuxième kanji est « tsu », le port. On mesure bien les relations de cette ville avec ses voisines chinoises et coréennes. C’est pas comme si ils cherchaient encore à se faire la guerre, tous, là…

 

Tenri (province de Nara)

Tenri

Ici, le kenji 天 « ten », le ciel, prend la forme d’une fleur de prunier. Il évoque le symbole de la religion Tenrikyo, dont le siège se trouve dans la ville et qui compte 2 millions d’adeptes dans le monde, dont 1,75 millions au Japon.

 

 

Hachijô (province de Tokyo)

Hachijo

Celui-là, il est intéressant: les kanji « hachi jô » 八丈, le nom de la ville, prennent la forme d’un oiseau. Cette ville est en fait constituée de deux îles, dont l’une est inhabitée depuis 1969. L’île habitée était le lieu d’exil des criminels pendant l’ère Edo (1603-1868). Sympa.

Mais en sachant ça, on comprend mieux l’histoire de l’incroyable roman-film-manga « Battle Royale« , dont l’histoire se déroule à Hachijô. Mon petit mari aime particulièrement ce film et m’en parle avec passion.Va faire un tour sur le wikipedia du film, en français, pour une fois, il est bien fait. Le synopsis: dans un futur proche, lassés par les comportements des adolescents japonais, des adultes organisent un jeu atroce: ils tirent au sort chaque année une classe de 3ème et les envoie sur cette île; « à la fin, il ne doit en rester qu’un ». Les élèves reçoivent un sac avec une arme dedans (du flingue au cintre en passant par le nunchaku ou les jumelles?!?) et doit tuer tous ses petits camarades pour survivre; de toute façon, à la fin, les colliers qu’ils ont autour du cou explosent sinon. Tout ça sur fond de Requiem de Verdi, et avec Kitano en survêt pendat tout le film. Voilà, voilà.

Inspiré de l’exil d’Edo, ce « jeu » est une sévère critique de l’élitisme du système éducatif japonais, de l’explosion de la cellule familiale japonaise.

 

Avec les Hiragana-Katakana

 

Ebino (province de Miyazaki)

Ebino

Là, c’est le caractère « e »:  えqui est déformé en mont Kirishima, près de la ville. Il me fait aussi penser à un motif traditionnel japonais représentant des nuages horizontaux, appelé « egasumi »:

 

 

Shimonoseki (province de Yamaguchi)

Shimonoseki

Ici, c’est  しも, « shi mo » écrits en forme de « puffer fish ». Mais oui, tu connais ce poisson, c’est le poisson-globe, le  fameux « fugu » que seuls quelques chefs japonais sont habilités à cuisiner sous peine de voir leur clientèle trépasser. Tous les ans, une petite dizaine d’aventuriers décèdent pour avoir tenter l’expérience; la plupart ont mangé le foie et les ovaires du poisson, les organes les plus toxiques, normalement interdits à la consommation. Il n’existe évidemment aucun antidote contre ce poison…

J’ai toujours été fascinée par ces maîtres-fugu, dont la formation dure deux ans (en plus de leur formation de base) et est validé par le ministère de… la santé. Ils apprennent à cuisiner, découper le fugu pour ne pas libérer les toxines dans la chair du poisson. Quelle pression quand même…

La pêche en est très contrôlée et a lieu essentiellement au printemps et à …Shimonoseki, eh oui. De quoi briller dans les dîners.

Fugu en Corée du Sud!

 

Le quartier Minato, bien connu de deux anciennes collègues de promo expatriées à Tokyo:

Minato

Le caractère « mi »   み est joliment stylisé.

 

Yokosuka (province de Kanagawa    )

Yokosuka

Le symbole de cette ville portuaire est un compas de marin, avec les katakana  ヨコ « yoko » au centre; il est dit qu’il évoque le symbole du clan Miura, une célèbre et influente famille japonaise qui a donné son nom à la péninsule Miura, où se situe la ville. Grande base navale et maritime, elle est jumelée avec Brest pour ceux que ça intéresse!

 

 

Pour les curieux qui en veulent encore plus, cet article est grandement inspiré de ceux de pinktentacle: et.